PRÉSENTATION
C'est un "voyage" artistique, spirituel, poétique que je réalise, un moment de silence et de recueillement dans le tumulte de nos vies.
Christian RONCERAY vit et travaille en Normandie, dans l'Orne.
Christian RONCERAY vit et travaille en Normandie, dans l'Orne.
Aucune référence au présent et à notre monde contemporain dans mes tableaux.
L'art, me semble-t-il, doit nous parler d'autre chose : l'invisible, l'impalpable, l'intemporel.
UNE ŒUVRE EN PERPÉTUELLE ÉVOLUTION
Après avoir traité exclusivement l'être humain pendant une quinzaine d'années, ce sont ensuite des architectures, des paysages, des livres et de l'écriture qui apparaissent dans mes tableaux. La matière (écorces, vieilles toiles...) est le point de départ indispensable à l'origine du tableau. Tout va naître de cette matière première qui par ses formes, sa structure va petit à petit se mettre en place, se transformer et créer un univers.
Chaque tableau en entraîne un autre qui est lui-même maillon d'une chaîne et tout cela doit avoir sa propre nécessité ou alors disparaître. Ne garder que l'essentiel et essayer de toucher l'émotion originelle : là est toute la difficulté et ce qui fait qu'il faut sans cesse continuer à travailler à ce qui fait l'œuvre d'une vie et la vie d'une œuvre.
LE
PAYSAGE
Traité sur deux cycles :
- "Lambeaux de nature" (2005-2006)
- "PAYSAGES-MÉMOIRE" (2007-2019)
Après avoir travaillé à
partir d'écorces pendant plusieurs années - cycle "Vies silencieuses"
(1998-2002) et cycle "Paysages-Apparitions et autres voyages" (2003-2004) - en 2005, j'ai utilisé ce matériau
de façon beaucoup plus brute.
Vieux sacs en toile,
papier kraft, écorces de différentes teintes forment l'architecture, la
charpente, l'essence même des tableaux. Des maisons seules ou enchevêtrées
donnant des villages hors du temps, sont alors apparues. La peinture est
toujours présente mais utilisée en fin de travail sous forme de jus ou de
quelques touches, donnant la tonalité générale. C'est le cycle "Lambeaux de nature".
En même temps, je
travaille une série de toiles sur les livres et l'écriture, où un outil (le
pyrographe) que j'utilisais de façon épisodique, va prendre de plus en plus
d'importance. L'écorce est alors brûlée, striée, raturée par la pointe de
l'outil. Plus le travail avance et plus la peinture tend à disparaître (série
"Paysages aux livres").
C'est au cours de la
réalisation de la série de quatre toiles intitulée "In mémoriam" que
la rupture, le passage va s'effectuer : la couleur (peinture) disparaît, hormis
les teintes naturelles (écorces, toiles, kraft ) et les traces faites par le
pyrographe prennent de plus en plus d'importance. C'est la fin des "Lambeaux de nature"
qui a duré plus de deux ans. Un basculement est en train de se produire et je
ressens le besoin de délaisser les écorces pour ne plus utiliser que le
pyrographe sur la toile seule. C'est le début du cycle "PAYSAGES-MÉMOIRE".
Je m'aperçois que je retrouve les mêmes sensations que lorsque je dessine avec
seulement un crayon et une feuille. Il n'y a plus alors d'intermédiaire (écorces,
couleurs...) mais simplement des traces (brûlures) sur la toile.
C'est avec cette économie de moyens que j'essaie d'aller à l'essentiel, au dépouillement. Une recherche qui est la mienne et la même depuis le début mais qui me fait prendre des chemins différents pour y accéder ; chemins que j'ai suivis en me laissant guider par mon intuition, sans jamais savoir où ils me conduiraient mais tout en étant sûr que je ne pouvais en prendre d'autres.
C'est avec cette économie de moyens que j'essaie d'aller à l'essentiel, au dépouillement. Une recherche qui est la mienne et la même depuis le début mais qui me fait prendre des chemins différents pour y accéder ; chemins que j'ai suivis en me laissant guider par mon intuition, sans jamais savoir où ils me conduiraient mais tout en étant sûr que je ne pouvais en prendre d'autres.
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2014 : création du groupe Silence Tierce avec Camille Couturier et Gérard Beaujard
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2014 : création du groupe Silence Tierce avec Camille Couturier et Gérard Beaujard
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LE MONDE DU
SILENCE par Ludovic Duhamel, Miroir de
l’Art n°94 (août 2018)
Comme au sortir de la nuit, juste
avant que la lumière ne jette son dévolu sur le monde, c’est un court instant
de grâce au cœur duquel le paysage échappe encore au mot qui le figera dans sa
vérité, ombre fuligineuse dont on ne sait presque rien.
Se devinent dans un halo brumeux
des formes spectrales. Est-ce un village à l’horizon ? Est-ce un
château ? Est-ce une forêt ?
Ici, la figuration se veut
discrète, à peine esquissée, aux frontières de l’abstraction. Comme si la
réalité qu’elle dépeint n’avait de fondements certains, comme si ce qui nous
entoure ressemblait à une sorte de mirage, tout prêt à disparaître sitôt que la
lumière sera faite sur cette histoire…
L’art de Christian Ronceray
s’attache à donner corps, à donner vie, à un monde en suspens entre ciel et
terre, en une vision fugitive au bord de l’effacement. Un peu comme la mémoire
d’un lieu qui subsisterait, malgré les années passées, dans l’esprit de celui
qui chercherait à toutes fins à en garder la trace, les réminiscences du
paysage hantant longtemps son inconscient, irisant la surface des souvenirs,
comme quelque résurgence surgie d’on ne sait où révèle l’eau limoneuse qui a
longtemps erré sous terre.
La peinture ici entre apparition
et disparition.
Aucune référence au présent et à notre monde contemporain dans mes
tableaux, écrit Christian Ronceray, qui ajoute : l’art doit nous parler d’autre chose : l’invisible, l’impalpable,
l’intemporel.
Au fil de cette peinture qui vise
dans son dépouillement à toucher l’essentiel, l’artiste nous immerge dans un
univers où l’humain a déserté, où les édifices que l’on aperçoit n’ont de
réalité que le sentiment qu’ils impriment en nous, un sentiment de fugace présence
et de fragilité.
Travaillant sur la toile brute,
Christian Ronceray révèle au grand jour, avec une infinie patience, par des
frottements, des calcinations, par des techniques qui n’appartiennent qu’à lui,
ces paysages impalpables, propices à la rêverie sans doute, qui viennent
chuchoter un univers singulier et nous plonger dans les brumes de souvenirs qui
ne demandent qu’à affleurer en nos consciences.
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SUR LES
TRACES DE CHRISTIAN RONCERAY par Luis
Porquet, Les Affiches de Normandie (décembre 2012)
L'Espace Culturel de
Saint-Germain-des-Angles consacre une magnifique exposition au peintre
Christian Ronceray. Pas moins de 120
tableaux illustrent l'univers de cet artiste hors du commun. Travaillant sur
toile de jute, Ronceray réinvente la mémoire et l'imaginaire des lieux qu'il
traite comme des apparitions surgies des strates profondes du temps.
Les ingrédients de Christian
Ronceray […] qu'on dirait patinés par l'usage comme autant de repères blottis
au fond de sa mémoire, semblent en parfaite adéquation avec le sens de sa
démarche. En marge du temps ordinaire (celui qui ne laisse pas d'empreinte),
des traces à demi effacées ou comme estompées par la brume se dévoilent peu à
peu, porteuses d'une histoire dont on cherche à dénouer ou retrouver le sens.
Troublé par ces apparitions soudaines […], le visiteur parfois
retient son souffle, comme si ces images flottantes, improbables, lui
évoquaient soudain quelque chose de familier, une lointaine enfance peut-être ?
C'est en vain que l'œil chercherait l'indice d'une
présence humaine. Seul le vent paraît habiter ces espaces voués à l'oubli, à
l'effacement progressif, au silence triomphant des demeures désertées.
Alors que notre monde se complaît dans l'agitation,
voilà un homme pour nous rappeler que le présent n'est qu'illusion, que seule
la présence fait de nous des êtres vivants. La seule réalité
est celle de l'éphémère. En explorer l'intensité est faire de la vie un
miracle. Quelques saints et quelques artistes y sont parvenus mais au prix de
quels sacrifices ! Notre siècle de bateleurs, de bonimenteurs patentés n'a
d'estime que pour l'imposture, le mensonge érigé en modèle comportemental. En
marge des courants dominants, quelques artistes cependant s'appliquent à ne pas
élever la voix. Leur démarche semble aux antipodes de la cacophonie ambiante.
Ils ont fait de leur solitude un domaine enchanté, une source féconde,
inspiratrice. La peinture de Christian Ronceray, si économe d'effets, si
étrangère à la surcharge, explore les territoires du rêve mêlés aux ombres du
passé pour faire resurgir un ailleurs. Aimant travailler par
séries, il éclaire par ses titres ce qu'il tend à mettre en valeur, cette part
infime mais essentielle qui fait de nous ce que nous sommes : Paysages
aux arbres - Réminiscences ; Lambeaux de nature ; Il était une fois... ; Pour
combien de temps ? ; Paysages-mémoire à travers lesquels des amers
surgissent de l'opacité, jalonnant un domaine intime, un jardin protégé.
La mémoire est l'une des choses les plus précieuses que nous ayons.
L'entretenir est une manière de ne pas succomber au néant. Ronceray le sait
mieux que quiconque. "Il suffit de fermer les yeux pour faire exploser le
monde" a écrit un immense cinéaste espagnol. Il voulait parler de celui
qui s'impose à l'extérieur. Mais le monde intérieur de l'Homme est tout aussi
vrai que celui dont les médias font leur credo. C'est un idéogramme
intimiste, un refuge apaisant.